OLYMPE AUTOUR DU MONDE

ARCHIPEL DES AÇORES

Un peu de géographie

L'archipel des Açores est situé au milieu de l'Atlantique nord, plus près cependant de l'Europe que du continent américain ; il comporte neuf îles principales qui s'étendent entre les latitudes nord 36° 55' et 39° 43' et les longitudes ouest 24° 46' et 31° 16'.

On a coutume de les diviser en trois groupes distincts ; le groupe le plus à l'ouest comprenant les îles de Flores et de Corvo, le groupe central, le plus important, avec Faial, Pico, São Jorge, Terceira et Graciosa, et enfin le groupe oriental avec São Miguel, la plus grande, et Santa Maria.

Toutes ces îles sont d'origine volcanique, étant situées sur la rencontre des plaques tectoniques américaines, eurasiennes et africaines. Elles sont apparues plus tardivement que les Canaries, les îles du Cap Vert ou Madère mais surtout sur une longue période : les îles les plus anciennes, Santa Maria et São Miguel remontent à 4 millions d'années alors que la plus récente, Pico, n'a guère plus de 300 000 ans. Ceci explique sans doute que c'est sur cette dernière et sur Faial, guère plus vieille, que l'activité volcanique est encore présente.

Compte tenu de leur position, le climat est tempéré, les températures variant assez peu, de 14°C de moyenne en hiver à 23°C de moyenne en été. Mais à voir le vert des vastes prairies descendant des pentes volcaniques jusqu'en bord de mer, on peut affirmer qu'il y pleut souvent ! En fait, le temps est très changeant malgré l'anticyclone qui englobe cet archipel la plupart du temps.

L'économie a souffert depuis que les vols transatlantiques n'ont plus besoin de cette escale pour leur ravitaillement, ça fait déjà un bail ! Quant aux compensations accordées par les Etats-Unis et la France après la réduction de leur présence militaire, elles sont loin de suffire à leur redonner leur splendeur passée. L'époque de l'industrie baleinière, arrêtée depuis 25 ans, n'est plus aussi qu'un souvenir. Comme Madère, cet archipel faisait partie des régions les plus défavorisées de l'Union Européenne jusqu'en 2004 ; heureusement, depuis, l'Europe a apporté beaucoup d'aides pour la réalisation des infrastructures de ces îles. Mais à voir leurs qualités et l'entretien impeccable qui en est fait, on doit considérer que cet argent a été bien placé. Ce n'est pas forcément le cas partout !

Aujourd'hui, l'économie est centrée sur l'agriculture, l'élevage de vaches et la pêche ; il y a aussi quelques industries agroalimentaires pour fabriquer des produits lactés, des conserves et des boissons. L'ensemble reste toutefois fragile et ne permet pas l'autosuffisance. Les aides de l'Union Européennes représentent encore 40% du revenu total. Quant au tourisme, il est encore embryonnaire et concerne principalement les navigateurs de passage : les Açores doivent être l'une des rares régions du monde où les touristes arrivant par bateaux sont plus nombreux que ceux arrivant par avion ! Et c'est dommage, car ces îles méritent d'être connues, comme nous le verrons plus loin, surtout si l'on est à la recherche de calme, d'authenticité et de qualité d'accueil. Mais ceci explique peut-être cela…

Un peu d'histoire

Les historiens ne sont pas d'accord sur l'époque de la découverte de ces îles ; ce qui est certain, c'est que ce sont les portugais qui s'y installèrent en premier au 15ème siècle mais, comme pour d'autres îles, il est quasiment certain qu'elles étaient connues auparavant. On parle des phéniciens au 6ème siècle avant J.C., puis des carthaginois et des vikings, mais la première source irréfutable fut donnée en 1154 par un explorateur et géographe arabe, Sherif Mohamed al Edrisi, qui dressa un globe terrestre et rédigea un rapport mentionnant neuf îles au nord de l'archipel des Canaries. Elles apparaissent également sur une carte génoise de 1351.

Mais pour en revenir aux portugais, on n'est sûr ni du nom du "découvreur" du premier groupe d'îles (le groupe oriental), ni de la date ; celle-ci se situe entre 1427 et 1431 et il fallut attendre 1450 pour le groupe central et 1452 pour le groupe occidental.

C'est à partir de 1439 que la colonisation du groupe oriental commença ; Cabral fut le premier gouverneur, établi sur São Miguel, avec pour mission de rendre le terrain propice à la culture. Il entama alors une déforestation de la forêt primaire et parcella les terrains de murs de pierres de laves encore visibles aujourd'hui. Les portugais n'étant pas assez nombreux à venir "s'expatrier" sur ce nouveau territoire, on fit venir des flamands, des normands et des bretons qui marquèrent leur empreinte dans le nom de certains villages et par la présence de moulins à vent.

A la fin du 15ème siècle, la position stratégique de cet archipel au milieu de l'océan en fit une escale incontournable de tous les navires marchands à destination ou en provenance des Indes ou du nouveau monde ; l'île de Terceira fut ainsi le centre névralgique d'un commerce prospère avec la présence de commerçants d'une dizaine de nationalités différentes. C'est alors que se développa la ville d'Angra, première "grande" cité à être développée au milieu de l'océan Atlantique.

C'est au 16ème siècle, lors de la guerre contre l'Espagne, que l'archipel attira la convoitise de cette dernière ; l'île de Terceira fut la plus rude à la résistance et il ne fallut pas moins de deux années avant que les espagnols ne viennent à bout de ce dernier territoire portugais. Ce sont alors les galions espagnols, chargés de leurs trésors en provenance d'Amérique du Sud, qui transitèrent par ces îles, attirant par là même pirates et corsaires anglais et français. C'est aussi à cette époque que la ville d'Angra devint la capitale de l'archipel.

Ce n'est qu'en 1640 lors de la restauration de l'indépendance du Portugal que les Açores entreront dans le giron continental. Mais les capitaines donataires restaient encore très indépendants ce qui incita le Portugal à créer en 1766 une capitainerie générale, basée à Angra, des gouverneurs étant délégués dans les îles. Cela n'arrangea rien, car ce sont ces mêmes capitaines généraux qui prirent leur autonomie.

En 1771, les îles devinrent une province du Portugal ; mais lorsque Napoléon envahit le Portugal en 1807, les anglais envahirent Madère et les Açores "pour les protéger".

Puis au moment de la guerre civile portugaise, de nouvelles idées libérales germent alors aux Açores et l'île de São Miguel, qui ne supporte plus sa subordination à Terceira, déclare son autonomie qui est reconnue par le continent ; les divisions s'accentueront entre 1829 et 1832 lorsque Terceira se rangera derrière les libéraux de Dom Pedro contre les absolutistes de son frère Dom Miguel. Après la victoire des libéraux lors de la révolution de 1832, les Açores devinrent une province divisée en trois districts : Horta, Angra et Ponta Delgada, situation qui perdure de nos jours.

Pendant les périodes fastes de la chasse à la baleine, nombre de baleiniers américains venaient aux Açores embaucher les pêcheurs locaux réputés pour leur adresse et leur endurance ; c'était aussi pour ces derniers l'occasion de sortir de la misère et beaucoup ne revinrent pas mais émigrèrent aux Etats-Unis, provoquant une émigration importante.

En 1855 fut posé le premier câble sous-marin transatlantique via Horta, l'île devenant alors une base pour nombre de compagnies importantes. Puis avec le développement de la marine à vapeur, les Açores devinrent une escale incontournable pour refaire le plein de charbon.

Lors des deux guerres mondiales, le Portugal finit par se ranger du côté des alliés qui y établirent des bases militaires stratégiques sur Terceira et Santa Maria. Le dernier conflit terminé, les Açores connurent de nouvelles vagues d'émigration vers le nouveau continent jusque dans les années 1960.

Le 25 avril 1974, la révolution des Œillets amena les socialistes au pouvoir ; les Açores devinrent alors une région autonome possédant son assemblée et son gouvernement. Lors de l'adhésion du Portugal à l'Europe, celle-ci permit des financements de développement d'infrastructures importantes. Si ces îles ne sont pas riches, elles ne sont plus miséreuses.

Notre séjour

Île de Faial

C'est le 18 juin 2012 que nous abordons l'île de Faial et son célèbre port de Horta, escale incontournable de tout navigateur de l'Atlantique : tout ce qui compte dans le monde de la voile, vieux gréements, coursiers ou plaisanciers du monde entier, y a fait escale un jour. "La plus petite grande ville du monde" ne comporte que 6 000 habitants.

Comme nous l'avons relaté dans le carnet de bord Martinique-Horta, les formalités ont été pour une fois…une formalité et nous nous sommes retrouvés à l'intérieur de la marina à couple de deux autres bateaux français : un ketch en acier du nom de Garatapo, amarré le long du quai et mené par François et Josée et un Grand Soleil 43 dont les propriétaires n'étaient pas présents lors de notre arrivée.


Le temps a beau être gris, l'environnement est plutôt agréable : le front de mer de la ville est sympathique et les célèbres dessins et peintures laissés par les bateaux de passage depuis des lustres sur les quais et les murs de la marina donnent une touche de couleur originale à l'ensemble.

Faial est une petite île de 21 km par 14 km ressemblant à une petite France un peu aplatie, peuplée d'environ 16 000 habitants ; elle doit son nom aux hêtres qui la recouvraient à l'origine (faia), mais on la surnomme l'île bleue à cause des nombreux hortensias bleus bordant les routes de l'intérieur. Son sommet, le volcan Cabeço Gordo, culmine à 1043 mètres.

La baie de Horta est située au sud-est de l'île, protégée au sud par la presqu'île du monte da Guia. Une longue digue protège le port de pêche et de commerce à l'intérieur duquel se situe la marina, elle-même protégée par deux autres jetées. C'est un des meilleurs abris des Açores et certainement le centre le mieux équipé pour réparer ou trouver des fournitures et des pièces de rechange pour le bateau.

Elle bâtit sa prospérité grâce successivement à l'exportation du pastel, à la pêche à la baleine et à l'exportation d'oranges. Aujourd'hui, le tourisme a partiellement remplacé ces ressources disparues.

L'après-midi de notre arrivée sera consacrée au repos et à la récupération de la traversée de presque 16 jours depuis la Martinique ; ce n'est que le lendemain matin, sous une pluie légère, que nous ferons un premier et rapide tour de la ville, passerons à l'office de tourisme et achèterons une nouvelle drisse pour le foc d'artimon que le captain mettra en place l'après-midi pendant que Maryse attaquera le cycle des lessives.


Le mercredi 20 sera une des rares journées ensoleillées de notre séjour ; nous en profiterons pour retourner visiter la ville et prendre des photos. De la marina, nous suivrons en direction de l'est le front de mer par l'avenida 25 abril, la rue Vasco de Gama et la rue José Azevedo, ce dernier étant le fondateur en 1953 d'un des plus célèbres bars dans le monde de la mer, nous y reviendrons. Et là, pas de surprise, on est bien au Portugal où carrelage et pavage sont les deux mamelles de la nation ! Comme à Madère, les trottoirs sont recouverts de petits pavés noirs et blancs formant des dessins et des arabesques toute lusitaniennes.

Nous longerons la place verdoyante do Infante, le fort de Santa Cruz transformé en pousada (hôtel) et restaurant et le café des Sports, plus connu sous le nom de Peter's Cafe, une institution à Horta ; tenu par la quatrième génération depuis son créateur, il a été depuis ses débuts le rendez-vous des navigateurs du monde entier grâce à tous les services spécifiques qu'ils y trouvaient. Il y en a ainsi quelques-uns dans le monde, à Kinsale en Irlande ou sur l'île de Groix. Il tient depuis peu une boutique adjacente mais surtout a constitué un petit musée présentant une superbe collection de scrimshaws, des dents de cachalots gravées par les chasseurs de baleine de l'époque dont certains étaient de véritables artistes.



Nous traverserons ensuite l'isthme de la presqu'île du mont Guia par la rua Nova pour arriver devant la petite plage de Porto Pim, une anse enchâssée entre le mont Queimado, le mont Guia et la partie est de la ville longeant la côte. Celle-ci est encore protégée par le fort de São Sebastião et la porte fortifiée de Porto Pim.

Nous reviendrons en direction du centre ville par les ruelles de Medeiros et Das Augústias, passant devant l'église Nossa Senhora das Angústias fermée.

Nous réemprunterons la rue Vasco de Gama avant de prendre une rue parallèle à celle du bord de mer et conduisant dans le centre proprement dit. Nous apercevrons alors une autre église en travaux, l'église de São Francisco avant d'arriver par cette rue commerçante à l'imposant ensemble du musée de Horta et de l'église Matriz de São Salvador dont seul le chœur était particulièrement chargé de dorures et d'azulejos.



Plus loin, nous atteindrons le petit marché municipal, assez décevant, puis la jolie place da Republica avec ses arbres, son kiosque et le bâtiment des pompiers.

Prenant une ruelle très pentue, nous arriverons à la tour de l'Horloge, au jardin Florencio Terra et à l'université, avant de reprendre le chemin de la marina pour Maryse, tandis que le captain repartait à l'autre bout de la ville gravir le mont Guia pour admirer la vue sur la cité et sur le port.

Prenant la route qui monte au sommet, il pourra admirer pour la première et dernière fois le mont Pico, de l'île du même nom, complètement dégagé des nuages. Ce mont Pico culminant à 2351 mètres d'altitude est le plus haut sommet des Açores et du Portugal.

Au détour de certaines portions de la route, on peut avoir un panorama assez exceptionnel sur l'anse de Porto Pim en avant-plan et sur la ville, le port et la marina en arrière plan.

A mi-distance, on passe devant la petite chapelle de Senhora da Guia malheureusement fermée, puis on continue jusqu'à arriver à l'entrée d'une zone militaire interdite d'accès ; on ne peut donc pas atteindre tout à fait le sommet situé à 145 mètres. Mais on a à ce point également une très belle vue sur l'ouest et la caldeira do Inferno noyée par l'océan et qui constitue une réserve naturelle interdite aux bateaux.

La journée se terminera par un apéro à bord de Garatapo avec Josée et François ; celui-ci a bien roulé sa bosse avec son voilier en Bretagne et en Manche et nous donnera de judicieux conseils pour aller mouiller aux îles Scilly.

Le lendemain, il pleut ; on voudrait bien partir visiter l'île en voiture, mais de ce temps pas question ; la journée sera donc uniquement consacrée à des manœuvres du bateau, le matin pour permettre à nos voisins du Grand Soleil de partir et l'après-midi pour aider un jeune couple et leurs deux enfants avec leur bateau Fantaisie à venir se mettre à couple d'Olympe. Ils se prénomment Paul et Gwenaëlle et au cours de la conversation nous apprendrons que Gwenaëlle est originaire du Vieux-Bourg de Fréhel ! Comme le monde est petit ! Leur pilote automatique est en panne et ils sont venus pour le faire réparer. Le nombre de bretons dans la marina devient réellement impressionnant… On ira tout de même prendre un pot au Peter's Bar pour respecter la tradition.



Le lendemain, il pleut ! Décidément notre période de transition entre les climats tropicaux et bretons bat son plein…On ne fera pas encore grand-chose sinon aller à un cybercafé car, si le wifi est gratuit dans la marina, il ne fonctionne pas très bien. Le soir, apéro sur Olympe avec Josée et François. Les prévisions météo ne sont pas fameuses et nous décidons de partir le lendemain tous les quatre avec le ferry visiter une partie de l'île Pico située juste en face.

Île de Pico

C'est à 7h30 que nous prenons le ferry pour le port de Madalena situé sur la côte ouest de Pico et atteint après une courte traversée de 25 minutes. Le temps est gris sur Faial mais quelques rayons de soleil arrivent à percer sur le littoral de Pico car la montagne est bel et bien dans les nuages. Il ne sera donc pas question d'effectuer la randonnée permettant de monter à son sommet (6h aller-retour).

L'île de Pico est la seconde en taille des Açores avec une longueur de 42 km pour une largeur de 15 km. Malgré sa taille, elle est peu peuplée avec ses 15 000 habitants environ, soit moins que Faial. La population est regroupée dans les trois principales villes, plutôt gros bourgs, Madalena, Lajes do Pico et São Roque, l'intérieur étant quasiment désert. Ces trois bourgades se jalousent depuis toujours au point qu'elles ne se sont jamais mises d'accord pour décider de l'implantation d'un hôpital sur l'île !

Si la chasse traditionnelle à la baleine (à la rame avec harpon manuel) a été la principale source de revenu de l'île jusqu'au début des années 80, c'est la culture de la vigne et la fabrication de fromages qui assurent aujourd'hui le gros des ressources. Nous en aurons vite un aperçu en parcourant les petites routes de l'île au milieu des champs de vignes parcellés par des murets de pierres volcaniques noires donnant un air bien triste à la campagne.

Nous commencerons la journée par rejoindre une curiosité naturelle située sur les pentes du volcan, la gruta das Torres, un tunnel de 5 km de long creusé par la lave s'enfonçant dans les entrailles de la terre. Nous nous égarerons avec la voiture dans les nappes de brouillards sur ces petites routes mal représentées sur le plan qui nous avait été donné par la société de location du véhicule, tombant parfois nez à nez avec un troupeau de vaches sorti d'on ne sait où.

La visite de ce tube est organisée et seuls les 500 premiers mètres sont ouverts au public. Nous serons huit personnes plus notre guide équipés d'un casque et d'une lampe, à partir dans une complète obscurité en découvrir les différents aspects : lave de type AA, déchiquetée et acérée, reste de coulées de lave en fusion souvent ridée, au toucher lisse et doux, stalactites et stalagmites de lave aux couleurs rouge ou blanche. Le tunnel principal est dédoublé par endroit par deux galeries secondaires que nous emprunterons. Nous avions déjà vu de tels phénomènes aux Galápagos et à l'île de Pâques mais pas de cette ampleur.

Après cette intéressante visite, nous entamerons un tour de l'île qui ne sera d'ailleurs pas complet par manque de temps, nous contentant d'effectuer le tour de la partie ouest de l'île en empruntant la route transversale principale.



Nous commencerons par la côte sud en passant par São Mateus avec son église blanche immaculée et son port minuscule uniquement constitué d'un quai et d'une cale soumis à la houle du large dans un environnement de pierres basaltiques noires.



Un peu plus loin nous verrons plusieurs moulins parfaitement restaurés avant d'arriver à Lajes do Pico et sa petite marina dont l'accès est pour le moins scabreux ; on peut encore y voir les vieilles installations de hissage et dépeçage des baleines et les fours destinés à en faire fondre la graisse.

C'est dans ce village que nous déjeunerons après une petite promenade dans ses ruelles étroites.

Nous reviendrons alors un peu sur nos pas pour prendre la route traversière et rejoindre la côte nord de l'île à São Roque do Pico, la troisième "importante" agglomération dont l'église date de 1696.


Longeant alors le littoral vers l'ouest, nous nous arrêterons à la ponta Negra qui porte bien son nom tant le paysage est recouvert de cette lave noire ; on y verra quelques habitations abandonnées d'une infinie tristesse et celles qui sont encore habitées ont beau rehausser les joints des pierres de peinture blanche, ça ne donne pas vraiment envie de s'y installer !



On verra en bordure de mer des étendues de coulées de lave en fusion maintenant refroidie dont les plis forment des dessins et des arabesques originaux ; avec un peu d'imagination, on pouvait deviner des profils de têtes humaines sculptés par la nature.

Il ne nous restera plus qu'à rejoindre Madalena où nous aurons le temps de prendre un pot avec nos amis avant de reprendre le ferry pour Horta avec une traversée plus remuante que le matin, le vent ayant forci. Pico ne nous avait pas vraiment enthousiasmés, mais nous l'avions vu sous un temps gris, ce qui aggravait encore la tristesse des paysages. François et Josée avaient pu monter une semaine avant notre arrivée au sommet du volcan, randonnée intéressante mais malheureusement sans visibilité : Pico ne se livre pas facilement semble-t-il…

Île de Faial 2

Le lendemain il ne pleut pas mais un vent fort s'est levé ; Maryse en profitera pour imaginer et préparer le dessin qu'elle immortalisera sur le quai de la marina dès que la météo le permettra. Un nouveau bateau est venu se mettre à couple en quatrième rang ; il s'agit d'un Ovni 44 originaire de La Trinité : un breton de plus !

Ce n'est que le 25 que la météo va redevenir plus agréable, sans pluie et sans vent, permettant à l'artiste du bord, armée de ses pinceaux et pots de peinture, de laisser la trace de notre passage comme le veut ici la tradition. Les prévisions étant également bonne pour le lendemain, nous décidons de louer la voiture pour faire le tour de l'île.

C'est donc le 26 au matin que nous partons faire notre visite de Faial ; une journée sera largement suffisante compte tenu de sa petite taille. Partant vers le nord de la côte est, nous monterons tout d'abord sur la Ponta da Espalamaca qui est le pendant du Monte da Guia mais de l'autre côté de la baie de Horta. Un monument surmonté d'une croix la domine ; de cet endroit on a également un bel aperçu de la baie, de la ville et du port.



Nous quitterons ensuite la route principale pour partir vers une route secondaire descendant le long du littoral et plus précisément à la praia do Almoxarife, une plage de sable gris devant le petit village éponyme. De là, nous pourrons apercevoir Garatapo au large parti le matin même pour le nord de l'Espagne.

Ce n'est qu'à Pedro Miguel que nous rejoindrons la route principale après avoir traversé une très belle campagne verte et vallonnée ; les champs sont ici aussi très parcellés mais avec des haies végétales qui seront petit à petit remplacées par des haies d'hortensias et d'hydrangeas au fur et à mesure que nous pénètrerons vers l'intérieur de l'île. C'est tout de même plus agréable et plus gai que les murets en pierre de lave de Pico !

Nous passerons par les villages de Salão et Cedros avant d'arriver au lieu dit Cascalho sur la commune de Ribeira Funda ; nous prendrons alors sur la gauche une petite route s'élevant jusqu'au pied du volcan. C'est sans doute la plus belle de l'île avec de magnifiques points de vue sur la côte nord et surtout des haies d'hortensias bleus, blancs et verts montant parfois jusqu'à trois mètres de haut sur les bas-côté. Parfois des rosiers sauvages de couleur rose se mêlent dans ces haies offrant des palettes de couleurs magnifiques.

Arrivés à Quebrada où de vastes aires de pique nique sont aménagées, nous prendrons sur la droite la piste de terre montant jusqu'au cratère situé à 1043 mètres d'altitude. La chance était avec nous car les nuages avaient eu la bonne idée de rester juste au dessus, nous permettant d'admirer d'une plateforme l'intérieur du cratère situé 440 mètres plus bas où eau et végétation se mêlent intimement. On peut y voir un petit cône volcanique secondaire recouvert de végétation.

A l'origine, il y avait un grand lac sur toute la superficie de la caldeira mais de 1957 à 1959, lors des activités sismiques à l'origine de l'éruption du Capelinhos, le lac disparut complètement. Nous restâmes un bon moment à admirer les lieux ; un chemin de randonnée permet de faire le tour du cratère en deux heures. Mais les nuages n'étaient pas loin, nous bouchant d'ailleurs la vue sur les îles de Pico et São Jorge, et nous n'avons pas tenté "l'aventure".

Nous redescendrons par le même chemin pour regagner la côte nord et nous diriger vers la ponta dos Capelinhos à l'extrémité ouest de l'île. C'est lors de l'hiver 1957-1958 que ce dernier volcan des Açores surgit de l'océan et recouvrit de cendres et de lave le petit village de pêcheur situé à proximité, ne laissant debout que l'ancien phare qui se retrouve aujourd'hui au milieu d'un désert lunaire. Le spectacle est assez grandiose et malgré la pauvreté du sol, quelques embryons de végétation commencent à voir le jour.

Dans cet ancien phare a été créé un centre d'information comprenant un musée et des espaces vidéo sur les phénomènes volcaniques en général et sur le Capelinhos en particulier. Mais nous étant déjà bien cultivés sur ce domaine aux Galapagos et en Nouvelle-Zélande, nous ne l'avons pas visité.

Nous aurons du mal à nous arracher de cet endroit si atypique mais nos estomacs commençaient à se rappeler à notre bon souvenir. Nous reprîmes alors la route côtière, passant par le nouveau phare avant d'atteindre le village de Varadouro où nous trouvâmes un petit restaurant en bord de mer. Si les Açores sont certainement une destination intéressante pour leurs paysages, leur calme et leur hospitalité, elles ne sont pas une destination pour des vacances gastronomiques ! On y trouve du poisson et de la viande notamment porc et bœuf (attention, le bœuf est souvent remplacé par de la vache), mais la préparation est des plus rustiques : ce n'est pas raffiné, c'est copieux et ça tient au corps ! Au moins n'a-t-on plus faim en sortant de table…


L'endroit avait le mérite d'être sur une belle portion de côte, aménagée par endroits de piscines naturelles pour se baigner dans les rochers à l'abri de la houle de l'océan.

Sur la route du retour à Horta par la côte ouest puis sud, nous nous arrêterons à la presqu'île du Morro de Castelo Branco, un gros rocher encore relié à la côte. Les vues sur le littoral y sont intéressantes et la végétation assez typique.

Arrivant à Horta par le sud, nous monterons à l'observatoire astronomique qui a été érigé par le prince Albert de Monaco, premier du nom et non l'actuel, un passionné d'astronomie.

Nous irons ensuite faire quelques courses d'avitaillement avant de rentrer au bateau sous un soleil toujours éclatant.

Le lendemain 27, veille de notre départ, nous irons visiter le musée de scrimshaws du Peter's bar. Certaines de ces dents de cachalots gravées sont énormes et peuvent dépasser les deux kilos. C'est une collection magnifique commentée par un guide sympathique parlant français et anglais. Certaines pièces sont remarquables, représentant des scènes de pêche à la baleine ou des personnages ou des visages magnifiquement expressifs. Nous y verront également quelques gravures représentants des personnages de la voile ou de la mer connus : Tabarly, Chichester, Moitessier ou le commandant Cousteau.

Certains artistes de l'île continuent à graver sur ces dents d'ivoire issues des anciennes pêches de cétacés maintenant interdites. On peut en acheter avec certificat attestant l'origine (car le commerce d'ivoire est aujourd'hui interdit), mais les prix sont élevés : compter entre 450 et 500 euros pour une petite pièce peu travaillée. Certaines pièces se négocient entre 5 000 et 25 000 euros…

Le lendemain 28 juin, après 10 jours passés sur cette première île des Açores que nous avions grandement appréciée, nous larguions les amarres pour partir sur l'île de Terceira située 70 milles plus loin.

Île de Terceira

Nous avions hésité sur la seconde île à découvrir entre São Miguel, la plus grande et la plus peuplée, avec des paysages de lacs paraît-il très beaux, et Terceira riche d'un passé historique et de sa superbe ville d'Angra do Heroismo, la première ville bâtie dans l'Atlantique par les européens.

Pour ce qui concerne le critère du rapprochement de notre destination bretonne finale, cela n'avait pas de conséquence, la première étant située un peu plus au sud mais plus à l'est que la seconde ; la distance pour rentrer restait équivalente.

Nous avons opté finalement pour Terceira, plus attirés que nous étions par l'aspect architectural de sa capitale classée au patrimoine historique de l'humanité par l'Unesco en 1983 et son passé chargé d'histoire que par de nouveaux paysages de lacs dont nous sommes pour le moment un peu rassasiés ; il ne nous semblait pas qu'ils puissent dépasser en beauté ceux que nous avions pu admirer par exemple en Nouvelle-Zélande. Et puis, si nous étions déçus de ce que nous verrions à Terceira, rien ne nous empêcherait de descendre ensuite sur São Miguel avec une étape plus courte.


C'est après une bonne dizaine d'heures de navigation sans problème que nous arrivâmes dans la marina d'Angra vers les 19h ; il semblait y régner une animation inhabituelle : d'abord des fusées explosives étaient lancées périodiquement, nous faisant nous demander ce qui pouvait bien se passer lors de notre approche. Puis, passant les môles d'entrée et pénétrant dans la marina, nous apercevrons une foule disséminée le long des quais et sur les pentes montant au château de Saint-Sébastien. Tout ce monde pour nous accueillir ? Non, c'est trop !

Par VHF, la capitainerie nous guidera à un ponton d'accueil provisoire où nous nous amarrerons avant de la rejoindre pour effectuer les formalités. Même bonne surprise qu'à Horta avec une organisation parfaite où le personnel de la marina prend tout en charge. On se fera alors expliquer la raison de cette foule massée dans le port : on fête la Saint-Jean et le Saint-Esprit, festivité qui dure de la Pentecôte à l'été et dont une spécificité est d'organiser des tourada a corda, corrida à la corde, des lâchers de taureaux dans différents endroits de la ville et de l'île. Et ce soir là, ça se passait dans le port !

Nous retournons rapidement au bateau prendre l'appareil de photos et partons nous mêler à la foule. Il ne semble pas se passer grand-chose jusqu'à ce qu'un box soit ouvert et qu'un taureau manifestement énervé n'en sorte et fonce d'abord sur des "matadors" amateurs l'excitant avec des parapluies, puis dans la foule, dont nous faisons maintenant partie, qui se met à courir pour tenter d'échapper aux assauts de la bête. Il y avait bien longtemps que nous n'avions pas couru si vite !

Celle-ci est maintenue par une très longue corde par des hommes en veste blanche, flanqués d'un grand chapeau local de feutre noir. Le but est sans doute d'éviter que le taureau ne s'échappe dans la ville et de limiter son rayon d'action ; mais à voir la difficulté qu'ils avaient à le ralentir, on se dit que l'assurance n'était pas tout risque ! D'autant que lorsque le taureau se retourne et fonce sur eux, ils lâchent tout pour aller se réfugier sur ou derrière un mur !

La corrida terminée, la foule se dispersera dans le calme et nous rentrerons dîner au bateau avant de partir la nuit tombée dans la ville où avait lieu un défilé.

On s'attendait à voir une jolie ville à l'architecture aboutie, nous ne fûmes pas déçus. Sortant de la marina, on arrive directement sur le parvis d'une belle église bleue, l'église de la Misericordia, joliment éclairée pour l'occasion et à l'extrémité de la rua Direita dont la décoration lumineuse pourrait concurrencer celle de Noël de nombre de grandes villes de France ou d'ailleurs. Un large tapis rouge avait été déroulé tout le long de la rue et de la rua da Sé par où devait passer le défilé.



Les façades des immeubles, majoritairement des 17ème et 18ème siècles, sont remarquablement entretenues et colorées. Toutes les ouvertures font l'objet d'encadrements travaillés de couleurs plus vives. C'était un régal pour les yeux et le peu que nous pouvions en voir de nuit ne nous faisait p17ème as regretter notre choix

Quant au défilé de ce soir là, il était surtout conçu pour les enfants avec des chars de très belle facture représentant différents contes, le petit chaperon rouge ouvrant le cortège au son de musiques locales. Au vu de la foule qui se pressait sur les trottoirs, en famille, la quasi-totalité de la population de la ville devait être de sortie ! La veille avait eu lieu le défilé principal, sorte de carnaval dansant et chantant avec de très beaux costumes. Nous retournerons à la marina en passant au travers des nombreux stands et buvettes installés le long des quais.

Le lendemain matin, nous mettrons Olympe à sa place définitive, plus grande et mieux protégée. Nous avons déjà pu tester le fonctionnement d'internet via le réseau wi-fi gratuit de la marina, il fonctionne parfaitement. Nous avons comme l'impression que nous allons nous encroûter ici !


Nous entamerons un tour presque complet de la ville sous le soleil, remontant la rua Direita jusqu'à la place de l'hôtel de ville, le palais do Concelho, jolie construction du 19ème siècle, continuerons par la rua do Marquès en faisant le tour du très joli jardin public parfaitement entretenu.


Nous entrerons ensuite dans une très grande église qui était autrefois celle du collège des jésuites ; elle porte aussi le nom de Nossa Senhora do Carmo. Imposante par sa taille, elle comporte dans ses six chapelles des autels en bois doré et des azulejos ; malheureusement, la plupart des tableaux étaient enlevés pour restauration.

Faisant le tour ce cette église, on passe devant le palais des capitaines généraux, ancien collège jésuite construit au 17ème siècle ; il changea de destination lors de l'expulsion de l'ordre en 1759. La cour est actuellement en travaux mais nous avons pu en visiter l'intérieur ; on ne peut imaginer que sur ces petites îles lointaines tant de luxe ait pu être développé pour le bien-être de ces capitaines de l'époque ! Malheureusement, il était interdit de prendre des photos.



Traversant la rua da Sé, principale rue commerçante de la ville, nous rejoindrons la rua do Salinas pour voir la cathédrale Do Santissimo Salvador da Sé, édifiée au cours des 16ème et 17ème siècles ; elle fut plusieurs fois endommagée récemment par un tremblement de terre en 1980 puis par un incendie en 1984. L'acoustique y est paraît-il exceptionnelle et l'on y vient du monde entier pour enregistrer l'orgue monumental. Un des autels et les lampadaires sont réalisés en argent et les peintures sur bois de cèdre datant du 16ème siècle sont splendides.

La rue descendant derrière cette cathédrale mène au palais Bettencourt, magnifique bâtisse baroque du 17ème siècle ; il sert aujourd'hui de bibliothèque publique et abrite les fabuleuses archives d'Angra do Heroismo : 400 000 ouvrages et 2 millions de documents. Sa façade principale présente un magnifique portique en pierre sculptée de la région composé de deux colonnes torses surmontées de chapiteaux et d'une plaque présentant les armes de la famille Bettencourt qui y vécut. Derrière se situe l'ancien palais épiscopal datant de 1544.

Nous reprendrons de la hauteur pour aller voir le manoir de Madre de Deus, un exemple de demeure seigneuriale des 17ème et 18ème siècles, caractéristique des quartiers les plus hauts des villes portuaires portugaises des îles et des colonies d'outre-mer.


Nous reviendrons à la marina par de petites ruelles hors des sentiers battus mais toujours bordées de jolies maisons aux couleurs harmonieuses. L'après-midi sera consacré à laver le bateau et à se reposer un peu en attendant de repartir le soir dîner de charcuteries régionales et d'un vin rouge portugais dans un des stands montés près du port à l'occasion des fêtes. Bon, mais sans plus…

Ce que nous n'avions pas vu venir, c'est la scène montée sur le quai à 50 mètres du bateau où un orchestre "moderne" viendra cracher ses décibels jusqu'à 5 heures du matin les deux nuits suivantes !

Après une petite grasse matinée pour récupérer de notre première nuit presque blanche, nous repartirons terminer la visite de la ville dans sa partie est. Nous monterons d'abord à la forteresse de São Sebastião à l'est du port ; on y a une jolie vue sur la marina mais la forteresse ne se visite pas.

Puis, par de petites ruelles, nous atteindrons un imperio, petite chapelle servant de jalon aux processions organisées à l'occasion des fêtes du Saint-Esprit ; il y en a 68 sur la seule île de Terceira. C'est minuscule et généralement très kitch !

Puis nous atteindrons l'église da Conceição, reconstruite vers 1543 dans le style renaissance ; une cérémonie de mariage y était en cours.

Nous remonterons la rua da Guarita pour aller voir un ancien couvent que nous découvrirons en ruines et sans intérêt ; cela nous permettra toutefois de repérer un petit super marché pour faire des courses ultérieurement. Redescendant cette même rue, nous atteindrons le couvent franciscain, le troisième construit à cet endroit ; il est aujourd'hui reconverti en musée que nous viendrons visiter plus tard.

De là nous emprunterons les ruelles montant à un point culminant de la ville où est érigé Outeiro de Memoria, une pyramide construite au milieu du 19ème siècle en mémoire de la présence du roi Pedro IV sur l'île où il prépara le débarquement de l'armée de la constitution au Portugal continental. On jouit de ce point d'une très jolie vue sur la ville et le monte Brasil constituant la péninsule située au sud-ouest.

Nous redescendrons par un sentier et des escaliers aménagés dans un beau cadre de verdure où pièce d'eau, fleurs et arbustes donne à ce circuit un charme fou. Nous déboucherons ainsi à deux pas de la place de l'hôtel de ville où nous prendrons un pot avant de regagner le bord.

Le lendemain, nous entamons le mois de juillet : dans trois semaines jour pour jour, nous serons rentrés au pays ! Nous avons encore du mal à réaliser…En allant à la capitainerie, le captain aperçoit un voilier hollandais amarré à la place voisine que nous occupions le jour de notre arrivée : son cockpit était entièrement calciné.

Renseignement pris, il était arrivé à 2h du matin la nuit précédente et le service de sécurité, grâce aux caméras, a vu le feu se déclarer à 4h du matin, les propriétaires étant encore à l'intérieur récupérant sans doute de leur traversée dans un sommeil profond. La réaction a été très rapide, allant réveiller les occupants qui sont sortis par un capot de pont tandis que les pompiers arrivaient en un temps record pour maîtriser l'incendie. Si nous étions restés à notre place, nous aurions eu encore très chaud ! Mais décidément, ce genre de sinistre n'est pas rare sur un bateau ; heureusement aussi pour les occupants que ce ne soit pas arrivé en mer. Le bateau a été rapidement sorti de l'eau en attendant les experts de l'assurance.

Nous partirons dans la matinée monter à pied au sommet du Monte Brasil ; curieusement il se situe au même endroit et avec la même disposition par rapport à Angra que le Monte Guia par rapport à Horta, son altitude étant un peu plus élevée à 205 mètres. En fait, il comporte quatre monts dont le Cruzinhas est le plus élevé. Cette grosse péninsule est ceinte d'un mur fortifié sur la plus grande partie de son périmètre et, sur les premières pentes, a été construit le fort São Filipe aujourd'hui base militaire locale.

Nous monterons par la route serpentant au milieu d'une végétation luxuriante commençant à ressembler à la végétation européenne mais aussi avec quelques espèces endémiques : nous avons bien quitté définitivement les tropiques ! De beaux points de vue sur les villes d'Angra à l'est et de São Mateus da Calheta à l'ouest parsèment le parcours où, à mi-hauteur, nous passerons le long d'un ancien cratère dont le fond est aujourd'hui cultivé.

Arrivés au sommet, de nombreux équipements de pique-nique sont présents : tables et bancs, carrelés bien sûr, barbecues, jeux pour enfants. Il y a aussi des canons, vestiges de la dernière guerre, et un monument en forme de colonne surmontée d'une croix.



La descente s'effectuera plus rapidement et le restant de la journée sera consacré à échanger des messages et à commencer à rédiger le site sur les escales açoriennes.

Le 2 juillet, le temps est au beau fixe ; nous louons une voiture pour deux jours afin de visiter l'île. La première journée sera consacrée à la partie sud-est et est avec comme points d'orgue la visite de la deuxième ville de l'île, Praia de Vitória, et la montée au serra do Cume.

Nous partirons vers l'est par la petite route côtière, nous arrêtant un peu avant le village de Porto Judeu pour admirer la côte et les deux îlots das Cabras qui à l'origine n'en faisait qu'un ; il a été coupé en deux par une éruption volcanique en 1550. Ils servirent d'abri à deux sous-marins pendant la dernière guerre.

Après le petit village de pêcheurs de Porto Judeu, on gagnera la pointe sud-est de l'île où trône le phare Cavalas. Nous le préférons vu de plus loin sur la route au milieu de la très belle campagne et des champs.



Nous rejoindrons ensuite la route principale pour atteindre le hameau de São Sebastião ; il se situe en fait sur le lieu du peuplement initial de l'île. Son église date de la fin du 15ème siècle mais a été remaniée au 16ème et ce n'est qu'en 1930 que l'on a découvert par hasard des fresques gothiques uniques aux Açores cachées sous des enduits. Elles sont aujourd'hui en restauration pour les protéger des méfaits du temps. Faisant face à l'église, la jolie petite place du village est sans doute le lieu de rencontre habituel des habitants.

Porto Martins sera le dernier village traversé avant d'arriver à Praia da Vitória, la deuxième ville en importance de l'île avec ses 10 000 habitants ; elle en fut même la capitale du temps des capitaineries de 1456 à 1474. Elle fut partiellement détruite par deux séismes, le premier en 1614, le second en 1841. Elle doit son nom à la victoire qu'elle remporta en 1829 contre les "miguelistes" qui avaient tenté un débarquement à partir de leurs 22 vaisseaux. Elle possède un petit centre historique que nous allions découvrir.

Mais plus récemment, la ville s'est dotée d'un nouveau port abrité par deux longs brise-lames et d'une petite marina qui redonne un peu de vie à la cité ; néanmoins, pouvant faire la comparaison, nous préférons nettement la marina et la ville d'Angra, il n'y a pas photo !



D'ailleurs, du centre historique on fait très vite le tour, concentré qu'il est tout près de l'hôtel de ville ; partant de la grande plage on arrive très vite à l'église de Santo Cristo qui, comme en témoignent les "discrètes" inscriptions de sa façade, fut édifiée en 1521, incendiée en 1921 et réédifiée en 1924 ! Elle était fermée au public. En face se situe la maison des Tantes où se trouve implantée la bibliothèque municipale, jolie bâtisse où vécut une partie de sa vie l'écrivain açorien Vitorio Nemésio.

Nous débouchâmes ensuite sur la place principale de la ville, la place Francisco da Câmara joliment pavée et sur laquelle est érigé l'hôtel de ville datant du 16ème siècle mais détruit par le séisme de 1614 et reconstruit à la fin du 17ème. L'architecture est originale avec la présence d'un campanile et son entrée dominant deux escaliers monumentaux. Nous déjeunerons sur la place en terrasse d'un café d'un plat qui cale bien !



Derrière se situe l'église principale connue sous le nom de Santa Cruz ; elle renferme une précieuse collection d'objets d'art religieux, raison sans doute de sa fermeture… Elle date de 1456 et fut remaniée au 19ème siècle. Les deux portails, principal et secondaire, sont intéressants.

Un peu plus haut dans la rue on peut voir de l'extérieur la maison natale de Vitorio Nemésio et puis… c'est tout !

On déambulera dans la rua de Jesus transformée en rue piétonne commerciale et pavée à la portugaise mais avec tout de même quelques jolies façades et on aura fait le tour de la question. C'est donc un peu déçus que nous reprendrons la voiture pour continuer notre circuit du jour.

Notre deuxième objectif de la journée était la Serra do Cume ; situé à 585 mètres d'altitude, il surplombe toute la plaine de Praia et l'intérieur de l'île. De Praia on y accède par la R2 s'enfonçant vers le centre puis sur la gauche par une petite route longeant les versants couverts de prairies où paissent des troupeaux de vaches bientôt transformées en dahus !

La vue sur Praia et les plaines alentour et leurs vergers quadrillés tel un patchwork par des murets de pierres basaltiques est remarquable. La vue sur les éoliennes est moins esthétique…

Pour le retour à Angra, nous éviterons la voie rapide pour ne prendre que des routes de campagne qui, comme sur Faial, nous gratifieront de jolies haies d'hortensias sur les bas-côtés.

Le lendemain était consacré à la fin du tour de l'île par les côtes nord et ouest. Pour gagner du temps, nous empruntâmes cette fois la voie rapide pour gagner le nord de Praia da Vitória et rejoindre la petite route devenant rapidement un chemin qui se faufile entre l'aéroport et le bord de mer. Les premiers hectomètres, une fois passé l'aéroport, étaient plutôt bucoliques, avec encore des troupeaux de vaches paissant en bord de mer parmi les fleurs des champs.

Puis, sur la commune de Lajes, nous traversâmes une immense base aérienne de l'OTAN qui joua un rôle primordiale dans la lutte anti-sous-marine lors de la seconde guerre mondiale. Des hectares de terrains étaient utilisés pour les logements du personnel, lotissements de luxe qu'envieraient de nombreux cadres supérieurs européens !

Quelques kilomètres plus loin, ayant rejoint la route principale, nous traversâmes le petit village de Vila Nova dont, paraît-il, l'imperio est de style gothique : à vous de juger!

La côte nord est plus élevée que sur le reste de l'île, de hautes falaises dominant l'océan ; nous nous arrêterons à la ponta do Misterio où l'on a une palette et un concentré des différents paysages de cette côte : végétations rases, prairies, falaises basaltiques, paysage lunaire et partout un océan bleu profond.

Plus loin, le village de Biscoitos possède un musée du vin sur lequel nous ferons l'impasse mais aussi de nombreuses piscines naturelles aménagées dans les couches de lave au bord de l'océan. De nombreux habitants du secteur viennent y prendre des bains de mer et de soleil.
Sur la commune d'Altares, nous nous arrêterons sur le lieu d'un ancien poste de vigie pour repérer les baleines à l'époque où la chasse n'en était pas interdite. L'endroit a été bien aménagé avec camping et aire de pique-nique équipée des indispensables barbecues. Mais tout est propre et parfaitement entretenu.

Nous arriverons enfin sur la commune de Santa Barbara d'où part la route montant à la serra éponyme, point culminant de l'île à 1021 mètres. Au sommet se trouve des installations de télécommunication qui gâchent un peu le site mais il faut bien avouer que le panorama n'est pas aussi beau que celui du sommet de Faial, voire même du serra do Cume vu la veille. Quant au cratère, on le devine à peine car comblé par la lave sur laquelle la nature a reprit ses droits. Mais le temps est splendide et nous y prendrons notre casse-croûte du midi largement passé.



Redescendant la route en lacets, nous prendrons ensuite en direction du centre de l'île pour nous arrêter d'abord au lac das Patas. Près de la route très peu fréquentée, il est situé dans un cadre charmant entre forêt de conifères, massif d'hortensias bleus et blancs et couvert de nénufars. Là aussi des aires de pique-nique sont aménagées mais, comme les précédentes, nous n'y verrons personne.

Nous resterons un petit moment à nous reposer à la vue des nombreux canards qui profitaient des rayons du soleil pour paresser au bord de l'étang. Nous continuerons ensuite presque jusqu'au centre de l'île pour aller voir les Furnas do Enxofre, quelques fumerolles sortant des roches volcaniques de l'endroit ; pas très spectaculaire, surtout après ce que nous avons pu voir sur l'île nord de la Nouvelle-Zélande !

Nous rentrerons alors à Angra, en nous arrêtant quelques instants à São Mateus da Calheta, petit port de pêche coloré.

Le lendemain 4 juillet, on commencera à regarder la météo pour choisir notre date de départ. On pensait partir assez tôt pour avoir le temps de s'arrêter aux îles Scilly avant d'aborder le sol français mais l'anticyclone était placé de telle manière que nous aurions eu du vent contraire sur la majorité de la route. Il était donc urgent d'attendre.

Le soir nous sommes allés voir une petite fête folklorique dans les ruelles d'Angra devant l'imperio situé au dessus du port. Il s'agissait de chants et de danses locales accompagnés par les guitares à 12 cordes de la région : des violas de arame. Nous fûmes invités à participer aux danses, le tout se déroulant dans une atmosphère conviviale et sympathique.
Les jours suivants s'égrèneront tranquillement en bricolant un peu sur Olympe, en préparant la route sur le GPS (ça nous a fait tout drôle de revoir la carte du pays et nos way-points bretons !), en se promenant dans la ville, en faisant les courses pour la cambuse, en classant les photos et en rédigeant le site. Le samedi 7 juillet, une fenêtre météo semblait s'ouvrir pour un départ le mercredi ou jeudi, ce qui sera confirmé les jours suivants.

La veille du départ, nous irons visiter le musée de la ville situé dans l'ancien couvent franciscain ; assez hétéroclite, on y trouve de vieilles voitures à chevaux, des rétrospectives de l'implication des îles dans les deux dernières guerres mondiales, des collections de meubles et de céramiques, des photographies de scènes de la vie et des fêtes locales.

Mais ce à quoi on s'attendait le moins, c'est l'émerveillement dont nous fûmes l'objet en entrant dans l'église de Nossa Senhora da Guia à son niveau supérieur : une vraie merveille ! Il est rare dans une vie de ressentir une telle émotion devant une œuvre d'art. Une magnifique couleur bleue pastel domine l'espace ; d'immenses azulejos recouvrent les murs de la mezzanine et de la sacristie. Les huit chapelles possèdent de beaux retables en bois doré et sculpté. Le cœur est un modèle d'équilibre, sans être trop chargé.

Pour couronner le tout, un orgue polychrome magnifique domine l'aile gauche et un véritable artiste jouait des partitions qui donnaient encore plus d'intensité à notre émotion ; ce fut un moment fort de notre voyage qui restera longtemps gravé dans notre mémoire.

C'est donc le 11 juillet que nous quitterons définitivement les Açores qui furent pour nous une révélation ; outre l'aspect historique de ces territoires, l'architecture des villes principales, la gentillesse et l'accueil des açoriens et la beauté des îles, nous y avons trouvé un cadre de vie presque idyllique où la douceur de vivre n'est pas un vain mot et où le mot insécurité n'existe pas. Oui, ces îles méritent d'être mieux connues.

Elles étaient aussi notre dernière escale avant notre retour, nous les avons donc goûtées avec délectation jusqu'au bout ! Et, comme pour boucler la boucle, en se souvenant du départ de Saint-Malo, Maryse pleurait en larguant les amarres…

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